Le CIRESC : Centre International de Recherche sur les Esclavages et Post-Esclavages
Le Centre international de recherche sur les esclavages et post-esclavages est une unité de service et de recherche rattachée à l’Institut des sciences humaines et sociales du CNRS et à la délégation Île-de-France Meudon du CNRS. À l’occasion de la Journée Nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions, nous vous proposons de découvrir ce laboratoire, son histoire et ses recherches.
Comprendre l’esclavage et le post-esclavage, c’est aussi comprendre en partie les origines du racisme. L’étude de ces thématiques reste fondamentale aujourd’hui pour apporter une contribution argumentée et apaisée à des débats souvent agités autour de cette notion en France. Dans cet esprit, le Centre international de recherches sur les esclavages et post-esclavages1 (CIRESC – CNRS) a pour mission de structurer les recherches au niveau français et de les valoriser au niveau international.
Pour étudier l’esclavage et le post-esclavage, les chercheurs du CIRESC s’interrogent, d’une part, sur la continuité entre l’Histoire de l’esclavage et la construction des races comme constructions sociales et ultérieurement du racisme et, d’autre part, sur l’importance de l’Histoire de l’esclavage dans l’Histoire de France. L’équipe du CIRESC regroupe ainsi des historiens, anthropologues, sociologues, philosophes, juristes, géographes, qui utilisent chacun leurs outils disciplinaires pour produire des résultats croisés dans le domaine.
Afin d’appréhender les problématiques de recherche dans leur intégralité, le CIRESC les envisage non seulement du point de vue des universitaires français, mais également d’universitaires issus d’autres continents. Pour structurer les équipes du laboratoire, Myriam Cottias, actuelle directrice et créatrice de l’unité, fait appel non seulement à des chercheurs français, mais également à des scientifiques provenant d’universités d’Afrique (notamment du Sénégal, du Cameroun, d’Île Maurice), d’Haïti, ou encore du Mexique. Ainsi, dès la genèse de l’unité et encore aujourd’hui, les recherches du CIRESC se sont positionnées au-delà des frontières nationales.
Un besoin académique et social
La création du CIRESC relève d’un réel besoin académique et social qui a été souligné par la loi du 21 mai 2001, la première loi Taubira qui déclare la traite et l’esclavage transatlantique et dans l’océan Indien comme un crime contre l’humanité. Quatre années plus tard, en 2005, les banlieues des grandes métropoles de France ont vu naître des mouvements de révolte de la part de la jeunesse. Leurs revendications reposaient en partie sur la dénonciation des conséquences de l’histoire de l’esclavage et la colonisation, et sur l’égalité entre tous les citoyens français.
Le gouvernement français de l’époque demande alors au CNRS des informations sur de potentielles unités qui travailleraient sur l’esclavage transatlantique et dans l’océan Indien mais le bilan est négatif : aucune unité en tant que telle ne travaillait alors exclusivement sur ces questions. Le comité national du CNRS contacte alors Myriam Cottias pour pallier cette absence.
Des chercheurs-citoyens
Les chercheurs et chercheuses du CIRESC se sont dès le départ positionnés comme des « chercheurs-citoyens », attentifs aux revendications qui émanent de la société. Ils/elles réfléchissent à des manières d’articuler ces revendications à leurs recherches lorsque cela est pertinent. Allant jusqu’au bout de cette démarche, le CIRESC participe très régulièrement à des opérations de diffusion de la connaissance auprès du grand public : que ce soit lors d’interventions dans la presse, dans des conférences, des écoles, auprès d’associations, etc. À travers les résultats de leurs travaux, ils apportent des outils scientifiques pour penser des problèmes sociaux.
- 1Qu’est-ce que le post-esclavage ? « Le post-esclavage est une notion qui permet de penser la rupture et la continuité. L’esclavage a été aboli de manière officielle au XIXe siècle pour toutes les nations occidentales, y compris le Brésil et les États-Unis. Le post-esclavage analyse cette rupture, cet avant/après l’esclavage, mais envisage aussi la continuité des systèmes de travail, des représentations et des hiérarchies sociales, des organisations de pouvoir. C’est à la fois penser les différences entre esclavage et abolition, et penser la continuité. » Myriam Cottias
Focus sur le programme REPAIRS
Le programme de recherche multidisciplinaire REPAIRS - Réparations, compensations et indemnités au titre de l'esclavage (Europe-Amérique-Afrique) (XIXe-XXIe) est financé par l’Agence Nationale de la Recherche. Il permet d’étudier les indemnités versées par l’État français aux possesseurs d’esclaves. Deux types d’indemnités sont examinées : celles versées par l’État d’Haïti à la France en 1825, en échange de la reconnaissance de la souveraineté de la première république noire ; celles versées à tous les propriétaires d’esclaves dans les colonies esclavagistes de la France après l’abolition de l’esclavage en France en 1849 en forme de dédommagement. Les chercheurs et chercheuses du CIRESC ont regroupé les noms de tous les indemnitaires dans une base de données qui permettra de comprendre la structure économique et sociale de ces sociétés esclavagistes.
Le programme REPAIRS s’intéresse également à la réparation : que pouvons-nous faire pour réparer l’histoire de l’esclavage, une histoire de violence extrême et de dissymétrie dans les rapports humains ? Les chercheurs et chercheuses du CIRESC ont effectué plusieurs enquêtes dans les Antilles françaises, à la Jamaïque, aux États-Unis et en Grande-Bretagne, entre autres, afin de réaliser un bilan de situation sur ces questions. Ces différents résultats de recherche sont présentés sous forme d’une carte interactive rassemblant toutes les informations sur l’abolition de l’esclavage, les indemnités ou non, et les réparations. Un lexique sur les termes du débat sur les réparations est aussi en cours de finalisation.